Les schistes de Burgess

Une formation rocheuse connue sous le nom de « schistes de Burgess », dans les Rocheuses de l’Ouest canadien, présente un remarquable témoignage géologique d’un monde ancien. Les fossiles exceptionnellement bien préservés des schistes de Burgess témoignent d’une période de l’histoire de l’évolution, il y a environ 540 millions d’années, marquée par une expansion rapide des formes de vie marine. Cette période est souvent surnommée « l’explosion cambrienne », faisant référence à une certaine « explosion » de la vie invertébrée dans les mers. Les embranchements animaux actuels, notamment les arthropodes, les mollusques et les cordés, apparaissent pour la première fois dans les gisements fossilifères des Schistes de Burgess datant de cette époque. Environ 200 espèces, comprenant des animaux à corps mou et dur, s’y retrouvent. L’apparition des premières coquilles et exosquelettes revêt une importance toute particulière. On estime que cette radiation prodigieuse s’est déroulée sur une période de 40 millions d’années, une période relativement courte du point de vue géologique. On dit que les schistes de Burgess présentent une plus grande diversité morphologique que tous les océans actuels.

Les arthropodes constituent le groupe animal le plus représenté dans les fossiles des schistes de Burgess. En effet, ils sont de 45 % dans la faune de Burgess. Viennent ensuite les éponges avec 20 %. Parmi les autres groupes animaux figurent les échinodermes, les algues et les cnidaires.

L’ explosion cambrienne se caractérise par une radiation évolutive de la vie multicellulaire, il y a environ 500 millions d’années.

L’un des fossiles les plus courants de Burgess est celui de Marrella splendens. Plus de 25 000 spécimens ont été recueillis. Marrella se caractériserait par un bouclier céphalique dorsal et un corps segmenté muni d’une paire d’épines recourbées vers l’arrière. Ses membres s’associent de manière proximale à des branchies, ce qui lui permettait de nager.

Anomalocaris, le plus grand arthropode cambrien connu, aurait été le principal prédateur des mers cambriennes. Caractérisé par des appendices épineux, de grands yeux composés placés dorso-latéralement, de multiples lobes latéraux appariés, une mâchoire circulaire, et des pièces buccales pointues, il se nourrissait souvent de trilobites, comme le suggèrent les morsures distinctives trouvées sur certains fossiles de trilobites cambriens, qui correspondent à la forme des pièces buccales d’Anomalocaris.

On pense que la créature de Burgess, Opabinia, se distinguait par un corps segmenté et profilé, un rostre flexible, une nageoire caudale, des lobes latéraux dotés de branchies et la présence notable de cinq yeux composés qui lui auraient permis la stéréopsie. En raison de l’absence de membres articulés, Opabinia n’est considéré comme appartenant à aucune catégorie connue d’arthropodes. On pense que c’était une créature très agile.

Illustration des créatures, vivant il y a 500 millions d’années, retrouvées dans les schistes de Burgess

Les arthropodes à carapace, abondants dans les schistes de Burgess, comprennent Canadaspis, Branchiocaris et Burgessia. Canadaspis et Branchiocaris, des arthropodes à carapace bivalve, seraient apparentés aux crustacés. Burgessia se caractériserait par une grande carapace circulaire et une longue épine postérieure deux fois plus longue que sa carapace.

Les schistes de Burgess préservent également des chordés primitifs. Parmi eux, Pikaia, l’un des fossiles de Burgess les plus rares et le premier groupe animal connu possédant une structure rappelant une colonne vertébrale, à savoir une notochorde. Il est considéré par de nombreux biologistes comme le dernier ancêtre commun de tous les vertébrés sur Terre.

La radiation importante des exosquelettes, observée dans les faunes de Burgess, pourrait être la conséquence d’une course aux armements évolutionnaires toujours plus croissante. On pense que l’évolution des appareils permettant la mastication a pu exercer une certaine pression sélective, favorisant ainsi le développement de structures défensives telles que les exosquelettes. Il a été suggéré que, puisque les exosquelettes fournissent un levier sur lequel les muscles peuvent agir, améliorant ainsi la mobilité, une telle adaptation aurait également favorisé leur évolution.

En raison du fait que les squelettes durs se fossilisent assez facilement, certains ont avancé que les schistes de Burgess ne représentent que l’aube des animaux complexes dotés de squelettes durs. Et il est fort possible que des animaux complexes dépourvus de squelettes durs soient déjà apparus avant le Cambrien.

Il est suggéré que des événements environnementaux majeurs ont favorisé l’explosion cambrienne. Par exemple, le Grand Événement d’Oxygénation, qui a duré des centaines de millions d’années et qui aurait été provoqué par les activités métaboliques des bactéries photosynthétiques, a entraîné une augmentation considérable des niveaux d’oxygène dans les océans et l’atmosphère cambriens. Cela a probablement joué un rôle majeur dans la diversification rapide de la vie complexe caractérisée par l’explosion cambrienne.

Les grandes glaciations, décrites par des hypothèses telles que l’hypothèse de la « Terre boule de neige » au cours de la période cryogénique, il y a environ 600 millions d’années, ont recouvert une grande partie de la Terre de calottes glaciaires. L’activité volcanique qui a suivi a pu susciter une augmentation progressive et substantielle des niveaux de CO2 dans l’atmosphère, réchauffant ainsi la Terre à un point tel que les calottes glaciaires ont rapidement fondu. De tels événements ont pu provoquer de rapides oscillations environnementales qui ont permis la libération de nutriments dans les océans, facilitant ainsi l’explosion cambrienne.

On sait que les créatures de Burgess vivaient dans des eaux peu profondes éclairées par le soleil. Mais elles furent ensuite piégées par des coulées de boue cataclysmiques qui les ont déplacées vers des récifs plus profonds, dépourvus d’oxygène. Les conditions anoxiques des eaux profondes ont probablement empêché la décomposition organique des créatures de Burgess. Au fil des siècles, la boue s’est solidifiée en schiste, conservant ainsi un précieux héritage fossile.


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